Ford a annoncé cette semaine que l’une de ses voitures, la Five Hundred, (qui peine à la vente) reprendrait le nom de "Taurus" après que la véritable Taurus initiale ait été arrêtée en octobre dernier, après dix ans de vie sans retyling. Un véritable abandon et une « ingratitude » car, la Taurus, comme vous le savez, est la voiture qui a littéralement sauvé Ford. En effet, à la fin des années 80 Ford connaissait de sérieux problèmes, Philip Caldwell, alors PDG de la compagnie, demanda à ses ingénieurs d’imaginer une voiture radicalement différente qui révolutionnerait le monde de l’automobile. Il ne fut pas déçu en 1985 à la sortie de la voiture. La Taurus, de l’avis de tous les experts, venait d’établir un benchmark (référence) en termes de produit (design futuriste), et en termes de développement & conception de produit. Cette méthode de conception sera d’ailleurs reprise par Alan Mulally alors chef du projet Boieng 777 (l’avion dont l’énorme succès fait tant de mal à Airbus) et aujourd’hui PDG de Ford. En 1992, la Taurus devient la voiture la plus vendue aux USA, battant ainsi la Honda Accord. Elle gardera la place de N°1 pendant cinq ans avant d’être détrônée par la Toyota Camry.
Comment Ford a-t-il pu « mettre à la poubelle » un tel succès ? Dans l’un de mes précédents posts, citant « The End of Detroit », je signalais déjà cette incongruité. Dans les années 90, Ford avait décidé de concentrer toutes ses énergies sur les SUV et les Trucks qui se vendaient alors très bien, avec de très belles marges. Malheureusement, la source s’est tarie quand ses concurrents (surtout les japonais, meilleurs en conception et développement de produits) ont commencé à s’intéresser à ces produits juteux. Les choses se sont vraiment gâtées quand le public à commencé à se désintéresser de ces véhicules (au passage très consommateur d’essence). Et voilà Ford qui se retrouve sans produit porteur , pour se retourner … Je rappelle que Ford a terminé l’exercice précédent sur une perte historique de 12,7 milliards de dollars et a dû hypothéquer ses usines pour emprunter les 20 milliards de dollars nécessaires à sa relance.
Ce schéma de fonctionnement n’est pas nouveau chez Ford. Je pense à toutes les méthodes de travail inventées par Henry Ford, oubliées par ses successeurs, reprises par Toyota et aujourd'hui « redécouvertes » et recopiées par Ford. Une bonne partie du TPS doit beaucoup à Henry Ford. Je pense que cela traduit aussi un style de management à l’occidental. Nous sommes toujours à la recherche du «super-héros » qui sauvera l’entreprise, du produit « miracle » qui fera la différence... Et chaque fois on repart de zéro. Les ressources et les énergies sont réorientées en permanence. Au fond, avoir des managers brillants et des super-produits n’a rien de mauvais. C’est le manque de continuité et de vision long terme qui cause problème. Il y a un mot qui me semble illustrer le style de management à la Toyota : « le pilotage automatique ». Toyota est une entreprise qui en l’absence de son pilote continuera à avancer parce que tout est en place, il y a des standards partout qui permettent de remonter les problèmes et le des gens en place qui les résolvent sans attendre des instructions venus d’en haut. Il n’y a pas d’à-coup ou de virage à 180 degrés … D'ailleurs combien de personnes connaissent le nom du PDG de Toyota? Très peu de gens, ce qui n'est pas le cas dunom du PGD de Renault Nissan. La vision long terme et la continuité, voilà deux mots interdépendants qui devrait nous faire réfléchir
Pour revenir à l’annonce initiale qui consiste à renommer une voiture qui se vend mal en Taurus. Je ne pense pas que cela soit le cœur du problème et je ne suis pas sûr que ce nouveau baptême sauvera cette voiture car la Five Hundred actuelle, construite sur une plate-forme Volvo, n’a absolument rien avoir avec la Taurus. En clair, c’est moins une question de nom qu’une question de bon produit.
11 février 2007
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