29 décembre 2008

Quelques suggestions pour vos bonnes résolutions 2009

En cette fin d’année où nous prenons de bonnes résolutions, en voici quelques unes que je voudrais suggérer aux managers, en général, et aux responsables d’usines en particuliers.

Suggestion 1 : Tenir un compte du nombre d’heures réellement passées dans votre usine (sur le terrain). Vous fixer un objectif (journalier / hebdomadaire / mensuel,…) et vous évaluer à la fin de l’année 2009 par rapport à cet objectif.

Suggestion 2 (Celle-ci est liée à la précédente) : Si possible, essayer de déplacer votre bureau, qui se trouve perché « là haut », dans l’usine. Entre autres bienfaits, cela facilitera votre accès à l’usine et augmentera mécaniquement le nombre d’heures passées sur le terrain.

Suggestion 3 (Liée à la précédente, également) : Positionner votre bureau et toutes vos équipes dans un open space. « Toute vos équipes » ne veut pas dire vos N-1 uniquement mais absolument tout le monde. Cela facilitera, entre autres, la fluidité de l’information et le relationnel. Vos collaborateurs passeront moins temps devant leur PC à s’envoyer des emails et auront plus de discussions directes et efficaces. Vous aurez un meilleur management visuel et un meilleur contact avec vos collaborateurs. Faites littéralement « tomber les murs »...

Suggestion 4 : Supprimer tout privilège visible (place de parking, restaurants, self, …) réservé à certains cadres de votre usine. Surtout, supprimer les places de parking nominatives réservées à certains de vos cadres haut-placés ou à vous-même. Toutes les places doivent être disponibles et accessibles par ordre d’arrivée le matin. L’intérêt pratique de ces privilèges n’est pas évident. Par contre, ils créent des barrières et, quelquefois, des frustrations inutiles…

Ces suggestions ne sont pas la solution à tous vos problèmes. Toutefois, par ces temps de crise, elles peuvent permettre de détendre le climat social et initier une réelle convivialité nécessaire en temps de changement…

28 décembre 2008

L’apprentissage est un processus à quatre phases

Il m’est arrive plusieurs fois qu’après avoir formulé des propositions d’amélioration (ou mise en œuvre de certains outils lean) de m’entendre dire « Mais, Alain, on fait déjà tout ce que tu viens de nous proposer… » Certains d’entre vous ont également dû entendre ce type de répliques. Quand vous avez connaissance de la réalité, cela peut mettre en colère ou décourager... En général, quand j’entends cette phrase je me dis plutôt que la personne en face est au tout début du processus d’apprentissage du lean. Cette personne est, pour ainsi dire, inconsciemment incompétente. C'est-à-dire qu’elle ne sait pas ce qu’elle ne sait pas (ou alors elle pense qu’elle sait des choses qu’elle ne sait pas en réalité). A partir de cet instant, le plus gros travail à faire est alors d’amener cette personne à prendre conscience de son incompétence. Cela n’est pas facile et demande beaucoup d’efforts des deux cotes… Apres la prise de conscience de l’incompétence vient l’action avec la mise en œuvre et la pratique des outils et le déploiement des concepts lean. Cela commence doucement et prudemment… La personne devient alors consciemment compétente. A la fin de cette démarche, cela devient une seconde nature pour elle. Elle devient alors inconsciemment compétente. Elle passe ensuite à d’autres concepts du lean.

Pourquoi est-il est important de déterminer la phase dans laquelle se trouve l’usine que vous conseillez ? Eh bien parce que, par expérience, le meilleur mode de déploiement du lean est de le faire de manière « tirée ». Si demandez à un manager de mettre en œuvre le lean alors qu’il n’est qu’en phase 1, alors vous fonctionnerez en mode « poussé » avec peu de chances de succès… Avant de parler déploiement, « amenez –le » tout d’abord en phase 2.



Qu’en est-il de vous ou des gens autour de vous ? Dans quelle phase vous trouvez-vous ? Phase 1, 2 3 ou 4 ?

22 décembre 2008

Quelle est la réputation de votre entreprise ?

Je voudrais compléter mon post sur Troubles sociaux : générateurs de Muda, Mura et Muri, en vous indiquant un site (http://vanno.com) qui classe les entreprises (indice de réputation) sur les critères suivants :

- Implication dans la communauté (arts, œuvres caritatives, éducation)
- Satisfaction du client (service au client, sécurité du produit, qualité, valeur et prix)
- Satisfaction de l’employé (rémunération, collégialité, diversité, satisfaction du job, management)
- Environnement (anti-pollution et recyclage, énergies propres et renouvelables, conservation et préservation, durabilité)
- Patriotisme
- Responsabilité sociale (droits des animaux, avoid controversial business, commerce équitable, bonne gouvernance, doits de l’homme)

Voici le lien vers les 100 premières entreprises de l’indice Vanno que j’ai extrait pour vous. A noter le classement plutôt honorable de Peugeot 24eme. Toyota est bien sûr bien classée : 4eme. Alors comment se positionne votre entreprise sur les 6 critères ci-dessus ? Qu’en est-il de vos principaux concurrents ?

20 décembre 2008

Meilleurs vœux de la part de Lean Machine Square

Cliquer ici pour avoir accès à la carte de vœux de la part de Lean Machine Square.

17 décembre 2008

Troubles sociaux : générateurs de Muda, Mura et Muri

Ci-dessous, un extrait de ce que l’on pouvait lire sur le Toyota’s investor relations web site en 2002.

“In 1950 the company experienced its one and only strike. Labor and management emerged from this stoppage firmly committed to the principles of mutual trust and dependence, and that corporate philosophy still guides our growth today.”


Je ne sais pas si la grève de 1950 est restée la seule et unique chez Toyota ? Cela peut dépendre de comment l’on compte. Je suppose qu’avec le développement fulgurant du constructeur nippon ces dernières années a l’international, il y a certainement dû avoir quelques mouvements sociaux (peut-être limités) ici et là.

Je suis très souvent revenu dans mes posts sur le fait que le « Respect des personnes » — respect for people — était le pilier le plus important de Toyota. Tout récemment, je me suis demandé comment, en tant qu’investisseur (adepte du lean) convaincu par cette idée, l’on pouvait mesurer cela dans une entreprise, très simplement et de manière pratique via des événements factuels ?

J’ai alors pensé au nombre et la durée des grèves dans une entreprise -- juste comme les pannes de machines. Sans vouloir faire du « pacifisme social », le nombre et la durée des grèves dans une entreprise pourrait être des indicateurs intéressant à porter non seulement dans les rapports sociaux de entreprise mais également dans des endroits (web site ou rapports) fréquentés par les investisseurs.

Mon propos ici n’est pas de discuter des causes ou des responsables des grèves, encore moins d’angéliser les syndicats ou les grévistes. Le fait est qu’une grève (davantage que la panne d’un équipement) est un état de crise qui génère les 3 Mu (Muda, Mura, Muri) en énormes quantités et, cela est indubitablement négatif pour l’entreprise.

13 décembre 2008

Combien d’erreurs avez-vous faites cette année ?

Je voudrais simplement partager la citation ci-dessous avec vous. Une citation de l’ex-PDG de Toyota. Je l’ai gardée en VO, c’est à dire en anglais. Il s’agit d’une invite à l’action. Tentez des choses faites des erreurs. Apprenez de vos erreurs. Corrigez-les et recommencez. Faites des erreurs… Apprenez de vos erreurs. Corrigez-les et recommencer de nouveau… Ainsi de suite....

"We place the highest value on actual implementation and taking action. There are many things one doesn’t understand and therefore, we ask them why don t you just go ahead and take action; try to do something? You realize how little you know and you face your own failures and you simply can
correct those failures and redo it again and at the second trial you realize another mistake or another thing you didn’t like so you can redo it once again.
So by constant improvement, or, should I say, the improvement based upon action, one can rise to the higher level of practice and knowledge."


Fujio Cho, President,
Toyota Motor Corporation, 2002


Mon commentaire : Il y a pire que se tromper ou faire des erreurs, c’est l’inaction. L’inaction est le grand des gaspillages. Combien d’erreurs avez-vous faites cette année ? Essayez d’en faire plus en 2009 car vous aurez tenté plus de choses et vous aurez beaucoup appris.

10 décembre 2008

Le lean, l’innovation, la profitabilité et le long terme

Quel est but d’une entreprise? C’est ma question favorite aux étudiants. En général, cela déclenche beaucoup de discussions. Je dois avouer qu’au fil des années la réponse qu’ils donnent à cette question est de plus claire et précise : « gagner de l’argent ». C’est en effet la réponse que l’on trouve également dans « le but » d’E. Goldratt. Cette réponse est probablement la plus partagée… Très souvent je la complète en rajoutant le besoin d’avoir une vision long terme car la stratégie utilisée pour gagner de l’argent rapidement ne peut pas exactement être la même pour gagner de l’argent à long terme. Entre les deux il y a souvent une grande différence qu’illustre l’écart de forme entre Toyota et GM actuellement.

Beaucoup de dirigeants d’entreprises prennent des décisions sur la seule base de la profitabilité (court terme) du projet et des risques associés. Ce sont clairement les critères financiers qui sont pris en compte : « Où devrais-je investir mon argent pour qu’il soit le plus rentable rapidement? » Cela semble bien raisonnable au premier coup... Eh bien, si Toyota prenait ses décisions sur la base de ces indicateurs, ils n’auraient jamais lancé une nouvelle marque appelée Lexus (les risques étaient trop élevés) et encore moins la Prius. En effet, comme le prétendait avec raison, la plupart des dirigeants du secteur de l’Automobile, la Prius n’était pas rentable. Des Big 3 aux PDG européens, chacun avait au moins un argument défavorable. Je me souviens d’une interview de Carlos Ghosn dans un journal américain qui conseillait « do the math » ; littéralement « faites les calculs » et vous verrez que cette voiture ne sera jamais rentable. PSA, pour sa part, a beaucoup communiqué sur les petites voitures ou les moteurs diesels, comme étant les « véritables » solutions a la réduction de la consommation des voitures avant de lancer son propre projet hybride (électrique-diesel) avec un objectif de commercialisation pour 2008.

Ces PDG avaient, peut-être, tout simplement oublié que parfois il ne faut pas décider uniquement sur la base de la profitabilité des projets. Certaines données de l’instant « I » utilisées dans la prise de décision peuvent changer rapidement. Il faut certainement intégrer davantage que la dimension profitabilité pure et immédiate… La Prius a été un jackpot sur toute la ligne pour Toyota (plus de 600.000 Prius vendues aux USA à ce jour). Au début cela a été une formidable opération marketing et quand le prix de l’essence a commencé à augmenter, le projet a également commencé à faire sens économiquement. Aujourd’hui tous les fabricants d’autos ont un projet d’Hybride en cours ou récemment achevé. On est en 2008, cela fait 8 ans que la première Prius est sortie ! Huit ans de retard, cela fait mal dans un secteur hyper compétitif. Le pire ou l’ironie c’est que certains constructeurs tel que GM avait de pris de l’avance dans le domaine avant que certains financiers du groupe expliquent qu’il fallait abandonner ces projets car non rentables. Les travaux des équipes de recherche sur le sujet remontent au années 70. Cela a continue jusqu’aux années 90 quand GM a finalement décidé d’abandonner le véhicule électrique EV1 car ils avaient d’autres priorités… Aujourd’hui GM, en très mauvaise état, reconnaît que cela fût une erreur stratégique. Dans le plan présenté au congrès américain pour obtenir l’aide de l’état, GM s’engage à concentrer une grande partie de son énergie sur ce type de voitures.


Cette tendance à décider sur la base des critères financiers (comme si on plaçait de l’argent) n’est certainement pas surprenante quand on regarde le background de la plupart de managers. GM a quasiment toujours eu des financiers à sa tête. Les décisions prises essentiellement sur la base de critères financiers ont tendance à favoriser le court terme au détriment du long terme et, par conséquent, peuvent quelquefois jouer contre l’innovation (comme on l’a vu sur l’exemple de GM). L’approche purement financière a également un autre inconvénient : celui de pousser vers la diversification. La diversification, n’est-ce pas un principe très important en investissement financier ? Alors savez-vous combien de marques a GM ? Réponse (13 marques) : Buick, Cadillac, Chevrolet, GM Daewoo, GMC, Holden, Hummer, Opel, Pontiac, Saab, Saturn, Vauxhall, et Wuling. Ce n’est pas vraiment de la diversification mais le principe y est.

09 décembre 2008

Le point commun entre le cerveau et le parachute

Je voudrais juste partager le dessin ci-dessous et la citation qui l’accompagne, trouvés dans un vieux document fondateur du lean : “ le cerveau, comme le parachute, ne fonctionne que quand on l’ouvre” -- The mind like a parachute, functions only when open.

04 décembre 2008

Encore le takt time…

Le takt time est un “outil” très « ambivalent ». Il est a la fois très facile à définir et quelquefois très difficile à utiliser. La définition est celle qui se trouve dans un de mes précédents posts. Alors quand on a cette définition qu’est-ce qu’on en fait ?
Voici les FAQ (frequently asked questions).

Première FAQ : Comment je calcule mon takt time sachant que le temps de cycle ou d’assemblage de ma ligne est de x secondes ?

Réponse : Le takt time n’a rien à voir avec le temps de cycle. Le takt time est en quelque sorte la « voix » du client et le temps de cycle caractérise la capacité du process. Quand vous avez le takt time et le temps de cycle, tout ce que vous pouvez faire c’est de les comparer. Si le temps de cycle est supérieur ou égal à votre takt time alors vous êtes « mort » : impossible de fournir votre client dans le temps imparti. Vous aurez besoin de mettre en œuvre l’une des 3 solutions suivantes : réduire votre temps de cycle (temps d’assemblage), allonger vos heures d’ouverture ou mettre prévoir des heures supplémentaires. Si votre temps de cycle est inferieur takt time, c’est prometteur mais ce n’est pas gagné (j’y reviendrai dans un autre post).

Deuxième FAQ : Comment je calcule mon Takt time, sachant que j’ai N personnes dans mon équipe ?

Réponse : La réponse est similaire à la précédente. Le nombre de personnes dans l’équipe peut, selon la nature du process, contraindre ou augmenter sa capacité. Le takt time peut être très utile pour déterminer votre nombre idéal d’operateurs. En effet, si vous connaissez le temps manuel total du process (temps pendant lequel vous avez besoin d’un operateur pour effectuer une opération) en le divisant par le takt time vous obtiendrez le nombre idéal d’operateurs.

Troisième FAQ : Quand je calcule mon takt time dois-je tenir compte des temps de pannes, de changement d’outils et autres arrêts ?

Réponse : Cette question n’a pas de réponse simple. Les débats peuvent se prolonger sur ce sujet. Voici ce que je fais : en général je préfère manipuler deux chiffres / valeurs : le takt time et le planned time. Je calcule le takt time sans tenir compte des arrêts (propres, fonctionnels ou induits). Ce chiffre est davantage utilisé à des fins managériales. Je calcule également ce que j’appellerai le planned time qui devrait être le temps maximum entre deux pièces à la sortie de ma ligne / machine. C’est ce temps-là qui me permet de valider que je peux bien sortir la demande du client. Le fait de calculer le planned time a un désavantage « philosophique » du point de vue du lean : on planifie des problèmes ce qui ne nous encourage pas à les confronter. Sur un plan pratique si vous ne souhaitez pas travailler avec le planned time vous devez alors vous organiser de manière a pouvoir mettre en œuvre des heures supplémentaires sinon vous allez droit dans le mur.

03 décembre 2008

Combien de temps dure une opération de 0,167 minute?

Dans mon post sur le Takt time je suggérais que le temps soit exprimé en secondes. Cette suggestion n’a rien de fantaisiste ou de dogmatique. En réalité, cette proposition ne fait pas toujours l’unanimité. Les opposants les plus féroces à l’utilisation des secondes sont les AET (Agent d’Étude du Travail). Ils trouvent en effet très commodes d’utiliser des minutes et des centièmes de minutes. En effet, c’est facile à manipuler (addition ou soustraction des temps). Ils aimeraient bien conserver cette situation… J’essaie toujours de leur faire comprendre qu’il est important que tout le monde dans une entreprise comprenne le process. Or le temps est une composante très importante dans la compréhension du process. D’où la nécessite de faire le maximum pour que la manière de caractériser le temps soit accessible à tous : AET et autres. Le temps « n’appartient » pas aux AET mais à tous (« démocratisons le temps ! »). Alors ma question, celle que je pose souvent, est la suivante : « si je vous dis que pour réaliser une opération il me faut 0,167 minute, est-ce que cela vous parle ? ». Dix fois sur dix la réponse est « Non ». Alors, j’enchaîne souvent en disant: « si, par contre, je vous dis maintenant que cela a pris 10 secondes alors cela vous parle plus ? » La réponse, dix fois sur dix, est : « Oui ».

02 décembre 2008

Qui connaît Monsieur Katsuaki Watanabe?

Les stars du monde industriel sont connues. Il y en a, comme Jack Welch (l’ex-PDG de GE) qui plusieurs années après leur départ continuent à squatter le petit écran prodiguant généreusement leur conseils sur ceci ou cela. Il y a quelques années nous avons eu J6M ou J2M (Jean-Marie Messier). Aujourd’hui, les stars du secteur de l’automobile sont connues.
En France, on a le très flamboyant, énigmatique et impressionnant Carlos Ghosn, PDG de Renault et Nissan (à lui tout seul) : véritable Superman « humain ». A une époque il était même question qu’il reprenne GM également! Juste pour vous donner une idée des capacités de l’homme.
Aux USA, on a le PDG de GM : Rick Wagoner, celui de Ford Alan Mulally. Toutes ces personnes sont à coup sûr des êtres largement au dessus de la moyenne. Des héros modernes, des héros comme on en cherche toujours dans nos entreprises occidentales car on pense que c’est eux qui font l’entreprise. Par leur seule force, ils sont capables de nous sortir de toutes les situations, même les plus difficiles… C’est cela qui justifie d’ailleurs leurs salaires (PDG de Ford : 28 millions de dollars en 2007 pour 4 mois d’activité) qui sont à la hauteur des espoirs qui sont placés en eux.
Le coté positif de la crise actuelle est qu’elle rétablie un peu d’humilité dans tout cela… On retrouve ces super héros ici et là venir quémander de l’argent du contribuable… Cela est criant pour GM dont le PDG a essayé de faire croire au congrès américain que ses problèmes actuels avait tout à voir avec la crise financière actuelle et rien a voir avec sa stratégie et son management. Je voudrais simplement rappeler qu’il y a une vingtaine d’années les auteurs de « The machines that changed the world » mettait déjà en garde les Big 3 contre leur entêtement à ignorer le besoin du Client. Il y a 5 ans, a l’occasion d’un voyage aux USA, je suis tombé sur un bouquin très instructif que j’ai acheté : « The end of Detroit ». Le scénario y était déjà écrit par l’auteure : Micheline Maynard, éditorialiste au New York Time. Ces managers, fidèles a l’assurance, que leur confère le statut de super héros n’ont rien écouté… Et ont y est aujourd’hui. Selon le New York Time, GM demanderait une aide d’environ 12 milliards de dollars à l’état fédéral. Franchement, je ne sais pas pourquoi cette fois cela marcherait… Cela risque d’être encore de l’argent perdu ! Rick Wagoner est a la tête de GM depuis plus de 10 ans (1998) que peut-il faire de nouveau ?

En réalité, je pense que le problème est mal posé et que l’on ne cherche pas dans la bonne direction. On aura bien avancé quand on arrêtera de chercher des héros, sur qui tout repose, pour piloter, nos entreprises. On aura bien avancé quand on comprendra qu’une bonne entreprise est celle qui a un process performant et qui peut, comme un avion en pilotage automatique, avancer efficacement sans forcement reposer sur un super héro. Je veux être clair, mon but ici n’est pas de dénigrer ces personnes aux qualités hors du commun. De même, je ne nie pas le fait que des leaders exceptionnels pourraient transformer une entreprise ou une nation. L’exemple exceptionnel de Mustafa Kemal Ataturk, fondateur de la Turquie, est parlant. Toutefois, des Mustafa Kemal Ataturk, des Michael Jordan ou des Tiger Woods (pour parler sport), cela ne court pas les rues et on en a un tous les 1, 2 ou 3 siècles. Le but de mon propos est donc simplement souligner le fait qu’avec des hommes « ordinaires » et un processus perfectionné (la place de la formation est importante ici), une entreprise peut produire des résultats extraordinaires… Toyota en est l’exemple ! Cessons de chercher des heros et travaillons sur le process.
A propos, monsieur Katsuaki Watanabe, comme je l’ai écris dans mes précédents posts, est le PDG de Toyota. Son entreprise est une star mais lui, il est à peine connu !

22 novembre 2008

“Aller a la soupe populaire en Porsche”

La semaine dernière les PDG des big 3, Rick Wagoner de GM, Alan Mulally de Ford and Bob Nardelli de Chrysler étaient à Washington pour implorer l’aide de l’état américain face à leur difficultés économiques. Leur démarche a largement été perturbée par le moyen de transport utilisé pour se rendre a Washington. Ils sont tous les trois arrivés en Jets privés. Comme qui dirait, ce serait comme “Aller a la soupe populaire en Porsche”. Cela a provoqué beaucoup de réactions et complètement éclipsé leur cause. D’autres informations ont filé… Par exemple selon des sources rapportées par le site de la chaine de TV américaine ABC la rémunération du CEO de Ford inclurait une compensation de 752.203 dollars liée a l’utilisation du jet de la compagnie pour des déplacements privés. Tout cela fait un peu désordre…

Mon commentaire : Il est possible que ces 3 compagnies trouvent une logique économique, de sécurité ou autre à faire voyager leur PDG dans des jets privés mais il y a quelques fondamentaux en management : quand on demande aux gens de faire des efforts (que cela soit en période de crise ou en conduite de changement), on doit comprendre que la dimension émotionnelle (la perception, la communication) est plus importante que la logique, même celle implacable des chiffres !

Aux dernières nouvelles GM aurait décidé de se débarrasser de 2 de ses jets privés. Selon le porte-parole de l’entreprise cela n’aurait rien à voir avec les critiques de ces derniers jours… La décision aurait été prise avant. Que cela soit vrai ou pas, force est de constater que l’actualité est truffée de ce type de coïncidences.

20 novembre 2008

Ce que la crise nous apprend sur Toyota


Ci-dessus, se trouve la courbe de production mondiale de Toyota. Comme on peut le constater, à l’exception d’une période au tour des années 90, Toyota a toujours été dans un cercle vertueux. « Les activités d’amélioration continue me permettent d’augmenter mes marges et mon matelas financier me permet d’invertir dans mes salaries pour en faire les personnes plus motivées et mieux formées de l’industrie, ces salariés me permettent d’aller plus loin dans mes activités d’amélioration pour attirer encore plus de clients, croitre et gagner encore plus d’argent ». Combien de fois des gens, quand je leur parlais des solutions lean chez Toyota, m’ont répondu. « Oui mais Toyota peut se le permettre cela car, il ne connait pas la crise ! » Eh bien, j’ai une info pour ces personnes : Toyota connait la crise maintenant. L’entreprise nippone est certes un peu moins frappée que les autres mais elle connait bel et bien la crise (-25,9% de ventes aux USA). Le point positif de cette situation est que l’on va pouvoir voir comment Toyota se comporte pendant la crise, comment son modèle fonctionne…On va pouvoir observer comment ils appliquent leur bons principes sur le respect des salariés. En effet, il est facile d’être « généreux » avec ses salariés quand tout se passe bien mais cela est moins évident quand les temps difficiles sont là.

La crise n’étant pas nouvelle, on a déjà pu observer quelques actions de Toyota depuis l’apparition de la crise. Dans les usines des US fabriquant les trucks et de SUV (en forte baisse), un bonne partie des salariés a été envoyée en formation, affectée à certaines tâches d’amélioration ou mutée sur d’autres sites (Toyota contrairement aux big 3 n’a pas mis tous ses œufs dans le panier des trucks et SUV). Jusque là, rien à redire…Surtout quand chaque jour arrive avec son lot de licenciements (exemple récent : Citigroup se sépare de 50.000 personnes). Cela dit, ne nous y trompons pas, même dans la crise, les « inégalités » demeurent voire s’amplifient. Toyota était en meilleure position que les autres avant la crise, Toyota est encore en bien meilleure position pendant la crise. En effet, avec son matelas de cash, Toyota est certainement capable de payer tous ses salaries pendant plusieurs années sans vendre une seule voiture avant de ressentir la moindre difficulté… Il est d’ailleurs possible que la crise agisse comme un épurateur… en accélérant l’agonie de certains constructeurs déjà malades ou moribonds. Et qui en profitera ? Toyota, bien sûr. Je ne sais pas si je dois me référer ici à la théorie de Darwin de « sélection naturelle » ou à celle d’Adam Smith de la « main invisible » qui trouve l’équilibre qu’il faut dans l’économie… Toujours est-il que la crise pourrait précipiter plusieurs des grands joueurs (notamment parmi les big 3) vers la banqueroute ou, au mieux, les amocher sérieusement. Cela donnera mécaniquement plus de part de marche à Toyota. Une fois de plus le lean, n’est pas une panacée (surtout en période de bonne économie), mais quand les temps durs arrivent, les entreprises les plus lean (surtout celles qui l’ont mise en œuvre depuis longtemps) sont mieux équipées pour en ressortir en meilleure position que leurs concurrentes…

18 novembre 2008

Manager c’est enseigner, mais comment?

Dans mes précédents posts, j’ai souvent insisté sur le fait qu’un bon manager devait surtout être un bon enseignant. Alors comment doit-il enseigner ? Est-ce en donnant des instructions claires et directives ? En précisant clairement à ces collaborateurs ce qui est important à retenir ?
Ma réponse : rien de tout cela. L’enseignement doit se faire par le questionnement. L’enseignant pose des questions. Le but n’est pas de voir si le collaborateur va pouvoir deviner la réponse qu’il a dans la tête (façon : on va voir si tu as la bonne réponse ou si tu as révisé ton cours). Comme le savent tous les « experts » de l’éducation, la réponse en tant que telle n’est pas ce qu’il y a de plus utile à l’étudiant. Le plus important est le processus par lequel il y arrive. Amener un étudiant à trouver une réponse lui-même lui permet de ne mieux comprendre et est une garantie d’un bon apprentissage… c’est aussi un processus qui permet d’obtenir un alignement être la compréhension que le manager et son collaborateur ont du problème à résoudre.

Si vous êtes le genre de chef qui donne de manière directive des instructions claires directes à ses collaborateurs (ce qui est considéré par certains comme une preuve d’autorité et de compétence) faites donc attention a votre mutation, elle pourrait être mal perçue, du moins dans un premier temps, par vos collaborateurs. « Tu as vu ? Notre chef est devenu bizarre. J’attends de lui qu’il soit directif et clair comme d’habitude et il me pose des questions, j’ai l’impression qu’il ne sait pas ce qu’il veut. ».

14 novembre 2008

Le ticketing électronique : eliminer ou chasser le gaspillage?

Je me souviens d’un consultant qui, il y a quelques années, nous conseillait de chasser le gaspillage quand on ne pouvait pas l’éliminer. Un domaine dans lequel le gaspillage a été chassé ces dernières années est celui du ticketing. Tout ou presque est électronique maintenant. Très souvent pour justifier l’intérêt de leur démarche les compagnies ou les secteurs d’activité qui s’y sont mis avancent le bien fait écologique généré par le gain de papier. Il mettent en avant l’économie du papier utilisé pour imprimer les tickets. Cet argument me laisse en général sceptique. Pourquoi ? Eh bien tout simplement parce que si on fait le bilan « avant » et « après » de la chaine de valeur opérationnelle (du fournisseur au client) le gain en papier n’est pas évident. En effet, avant, le fournisseur (la compagnie aérienne) imprimait un billet (de préférence sur papier cartonné) et me l’envoyait. Je gardais ce billet jusqu'à mon enregistrement. Aujourd’hui, avec le ticketing électronique, la même compagnie m’envoie un email de plusieurs pages (pleine d’infos) et comme je ne sais pas laquelle de ces infos est importante ou celle qui me sera réclamée à l’enregistrement, j’imprime tout, y compris le logo de mon fournisseur, celui de lotus notes ou de Gmail (si je le reçois via mon adresse chez Gmail) y compris tous les avertissements, de plusieurs lignes, que chaque intermédiaire y rajoute. « Téméraire » comme je suis, je prends le risque d’imprimer en noir & blanc mais j’en connais, autour de moi, qui impriment en couleur pour être certain qu’aucune info n’est altérée. Me voila avec 4 pages de documents imprimés 3 semaines avant mon voyage. Je présume que personne ne fait l’effort d’être succinct ici (en terme d’info) car cela ne coûte rien d’en donner plus, en effet tout est électronique et « cela ne mange pas de pain »… Puis, inconsciemment, comme je sais que ce document est reproductible à souhait (il suffit, en effet, de le réimprimer quand j’en aurais besoin) je ne le range pas spécialement bien. Me voila à la veille de mon voyage et je ne retrouve plus les 4 pages que j’ai imprimées il y 3 semaines. Et voila, je réimprime de nouveau les 4 pages …
Me voici donc devant le comptoir pour l’enregistrement le jour de mon voyage. Qu’est-ce que je fais ? Je m’avance vers l’hôtesse en charge de la réservation, et lui tends mon document de 4 pages. Comme avant je lui tends un document papier. Rien n’a changé par rapport à « avant » sauf que cette fois-ci j’ai dû imprimer 8 pages. Le bilan en terme écologique n’est certainement pas positif. Certes, et c’est là que les compagnies utilisant le ticketing électronique manquent de franchise, ma compagnie de transport a fait l’économie d’impression de mon billet (c’est beaucoup d’argent en terme d’économie) mais elle a chassé ce gaspillage vers moi (le client). Le ticketing électronique, a ce jour, fait gagner de l’argent aux compagnies qui les émettent mais il n’est pas évident que cela soit un « plus » écologique pour la planète.

Au delà du ticketing, force est de constater que l’immatérialisation des documents en plein développement autour de nous n’entraine pas toujours une réduction de la consommation du papier. Soyons clairs, je ne plaide absolument pas pour le retour au papier dans le ticketing. Je dénonce tout simplement la communication (ou le modèle de chiffrage) des compagnies impliquées. Pour être sérieuse sur l’impact environnemental, les compagnies qui passent aux tickets électroniques devraient encourager voire récompenser l’utilisation des cartes d’identification (carte de crédit, carte d’abonnement, carte de fidélité,…). Elles devraient également fiabiliser et rendre robuste l’utilisation des cartes d’identifications associées aux tickets électroniques de manière rassurer les clients et éviter des impressions inutiles. Même dans ce cas, mon petit doigt me dit qu’un certain nombre de personnes, par prudence, (car un le voyage est un événement stressant pour beaucoup de personnes) continueraient à les imprimer. C’est certainement leur façon de réduire leur niveau de stress potentiel lié au risque de dysfonctionnent du système d’identification ou du système informatique en général, systèmes auquel ils n’ont pas entièrement confiance.

Et, à propos de la « chasse du gaspillage », elle doit se faire vers l’amont (le fournisseur) et non vers l’aval (le client), comme l’on le voit de plus en plus dans certains services…

10 novembre 2008

Rien à voir avec le lean?

La semaine dernière j’étais à Chicago pour assister à la victoire historique de Barack Obama. J’étais dans foule de personnes que vous avez vue à la télé, au Grant Park, lors de son discours de victoire ? Mais qu’est-ce qu’Obama a à avoir avec le lean ? Dans un précédent post, je soulignais comment le Président élu des USA avait utilisé des principes du lean pour battre Hillary Clinton lors des primaires démocrates. Rien n’a changé lors des élections générales. Il a mené ce que les commentateurs politiques américains ont appelé une campagne « parfaite » qui sera enseignée dans les écoles de sciences politiques. Je ne vais pas revenir sur sa collecte de fonds record près de 700 millions de dollars.
Le 4 novembre j’ai pu vivre l’émotion des américains en direct, dans les rues : Blancs, Noirs, Asiatiques, Latinos,… Tout le monde s’embrassait…Même des personnes qui ne se connaissaient pas.
Quel est donc le lien entre la victoire d’Obama et l’entreprise ?

Il y a quelques temps j’ai eu l’honneur de participer aux réflexions sur la diversité dans une grande entreprise française. J’ai essayé, à l’occasion, de faire passer quelques messages simples. L’un d’eux consistait à dire que le test d’acide du niveau « d’inclusivité » d’une entreprise était que toute personne qui rentre dans l’entreprise quels que soient son background, sa couleur de peau, sa formation, son niveau social, sa religion,… devrait être capable de devenir PDG. Mon exemple favori était celui de Carlos Gutierrez, l’actuel secrétaire (équivalent ministre en France) au commerce. Ce cubain d’origine a appris à parler anglais en étant employé comme porteur dans un hôtel. Il est ensuite entré chez Kellogg en 1975 comme chauffeur de camions, a passé tous les échelons pour finalement accéder à la tête du groupe en 1999. Il est secrétaire au commerce depuis 2004. Aux USA, il y a eu de nombreux exemples comme ceux-là dans les entreprises. Le test d’acide restait en suspens en ce qui concernait la politique. Les USA l’ont passé avec succès le 4 novembre dernier… On peut désormais dire que tout américain, quels que soient sa couleur et son background peut devenir président… Le lien avec l’entreprise, le voici… Le véritable respect des employés qui est l’un des piliers du lean (le plus important selon Toyota) commence par l’existence réelle d’univers de possibilités. Il n’y a pas de motivateur plus puissant que de travailler dans un environnement ou tout est possible, si l’on est prêt à relever les défis et à produire les efforts nécessaires. Pour cela les règles de promotion doivent être claires, justes et équitables… La promotion ne doit donc pas être le fait d’un prince (quel qu’il soit) mais le résultat d’un processus connu et suivi par tous…
Un test tres simple à faire pour commencer : Combien de personnes dans votre organisation occupent la même fonction d’operateur depuis 15, 20, 30, 35 ans, comme j’en ai vues dans certaines entreprises ? Quelle en sont les raisons ?
Pour finir, laissez-moi reformuler le test d’acide « toute personne qui rentre dans votre entreprise, quels que soient son background, sa couleur de peau, sa formation, son niveau social devrait être capable de devenir PDG ». Est-ce le cas dans votre entreprise ?
Sinon, il se peut que votre démarche lean s’appuie sur un pilier en argile : celui du « respect des employés ». Cela, certes, ne vous empêchera pas de lancer une démarche lean voire d’avoir de gros gains sur le court terme.

31 octobre 2008

Le lean: est-ce une histoire de théorie ou de pratique?

Vous avez certainement eu l’occasion d’entendre autour de vous quelqu’un dire avec un certain dénigrement en parlant d’un « expert » du lean « celui-là c’est un théoricien, il parle des choses qu’il ne connait pas… ». De manière générale se faire appeler théoricien dans les milieux industriels en France n’est pas un compliment ! Alors comment expliquer que les références mondiales du lean, auteurs des bestsellers, soient tous des universitaires /chercheurs qui n’ont pas passé beaucoup de temps dans les ateliers. Par exemple Jeff Liker, Jim Womack, Dan Jones et Dan Roos, auteurs des deux bestsellers de tous les temps dans le domaine du lean, sont tous des chercheurs à l’origine. D’ailleurs Jeff Liker et Dan Roos sont encore respectivement Professeur à L’université du Michigan et au MIT.

Le milieu du lean est peuplé de personnes aux backgrounds très différents. Sans vouloir me lancer dans une quelconque taxonomie sociologique. Il y a à l’une des extrémités du spectre des gens que je qualifierais de «lean evangelicals ». Il s’agit, pour la plupart, de gens qui ont tout appris sur le terrain et qui croient au lean come à une religion. A l’autre extrémité du spectre, se trouvent ceux que j’appellerais les « lean intellectuals ». Qui sont en général des gens avec un solide background universitaire. Ces personnes sont, pour la plupart, auteurs d’un ou plusieurs bouquins sur le lean. Quelques uns d’entre eux méprisent le terrain et préfèrent passer du temps avec les Managers et les PDG pour discuter stratégie et autres sujet plus ou moins abstraits… Les «lean evangelicals » et « lean intellectuals » ne s’apprécient pas toujours mutuellement. Les un accusent les autres de passer du temps dans les bureaux et de ne pas savoir de quoi ils parlent. Les autres considèrent que les uns appliquent des outils sans les comprendre.

Toyota se considère comme une organisation apprenante « learning organization » constituée de chercheurs. Les gens sont vivement encouragés à essayer des choses et à réfléchir / apprendre de leurs actions (réussies ou non). Le bon équilibre me semble être celui traduit dans la citation suivante : “Action without theory is aimless; theory without action is lifeless”. Il se trouve que je suis arrivé au lean en « écrivant des équations » pour essayer de modéliser les systèmes de production (cliquer ici pour voir un exemple utilisé dans un cours au MIT). J’ai fait beaucoup de recherches sur le lean mais j’ai également participé a la mise en œuvre du lean (j’ai conduis et continue à conduire des chantiers sur le terrain). J’ai appris et continue toujours à apprendre via la théorie et la pratique. J’ai donc autant de respect pour les uns que les autres. La théorie nous permet de comprendre, prévoir et donner du sens, la pratique permet de valider et donner vie a nos idées. Attention, il y a des choses que l’on ne comprend que quand on les applique et les voit en action. Que l’on fasse la théorie ou que l’on soit dans l’action, le plus important est de comprendre / apprendre. C’est cela, a mon humble avis, le bon équilibre. Que ceux qui ont du mépris pour les « théoriciens » n’oublient pas qu’Albert Einstein a bâtit toute sa théorie sur la relativité sans jamais rentrer dans un Labo. Et, ce n’est que des années plus tard que l’on a pu vérifier et valider sa théorie.

26 octobre 2008

Back to basics… Le flux tiré (# 1)

Le flux tiré s’appuie sur la commande du «Client» qui tire le flux matière à travers le système (chaine) de production. Le flux tiré peut être vu comme une réaction en chaine initiée par la consommation du client. C’est bien en cela qu’il s’oppose au flux poussé dont le principe de base est de fabriquer le maximum de produits possible des que possible... Le flux poussé est souvent la traduction d’un manque de visibilité à la fois sur le besoin du client et sur process. Un directeur d’usine qui a un process très peu stable (pannes équipement, livraison de matières premières…) aura tendance à produire le maximum de ce qu’il peut dès qu’il le peut car l’avenir (la disponibilité de ses machines) est incertain… Une bonne image du flux tiré est celle du supermarché, qui aurait d’ailleurs inspiré Taiichi Ohno (le père du TPS, TPS signifie Toyota Production System) : « on ne remplace que ce que le client consomme sur les étagères… ». Dans l’imagerie populaire, le flux tiré est perçu comme le symbole par excellence du TPS. Il est d’ailleurs quelquefois erronément réduit au flux tiré et, le flux tiré erronément assimilé au kanban. Une fois de plus le kanban n’est pas un Système mais un moyen de communication de la demande du client à travers le système de production. Le kanban n’est qu’un outil d’un autre outil…

Les principaux avantages sont :
- Cet outil permet de diffuser la notion du « client » dans l’entreprise.
- Bien mis en œuvre, il doit permettre la réduction de vos encours, et autres stocks.
- Le flux tiré vous « contraint » de travailler sur la stabilité de votre process. En réalité, comme toute organisation de production, la stabilité du process est le pré requis à la mise en place du flux tiré.

Principaux inconvénients ou points à surveiller :
- Il existe plusieurs techniques, les étudier afin de déterminer celle qui est la plus appropriée à votre besoin.
- Certaines mises en œuvre mal conduites peuvent déboucher sur l’augmentation de vos stocks ainsi que de certains coûts de production.
- Ne pas se précipiter vers de outils électroniques et solutions sophistiquées largement rependues sur le marché. Commencer simplement par des jetons (signification du mot kanban) ou des cartes afin de vous assurer que la dimension pédagogique de la démarche n’est pas escamotée.

20 octobre 2008

Back to basics… La production lissée

Les principaux avantages
Le lissage de la production permet de :
- Eviter la surcharge physique par l’équilibrage des tâches
- Maintenir une production conforme à la demande du client (suppression de la production par lots et par conséquent réduction du lead time de chaque type de produit)
- Augmenter l’efficacité du travail (en équilibrant le travail de chaque operateur à chaque poste).

Il s’agit d’un pré requis pour le travail au Juste à Temps. La production lissée maximise les avantages du Juste à Temps en nivelant à la fois la quantité et la diversité des pièces durant la période de production.

Principal inconvénient ou point à surveiller
Le lissage n’est réellement raisonnable que si les temps de changement d’un type a l’autre est très faible. Réduisez d’abord vos temps de changement (ou ayez un plan pour) avant de mettre en œuvre la production lissée.

18 octobre 2008

Back to basics … La production en flux continu (PFC)

Les avantages de la PFC sont :
- Réduction des encours (cela réduit mécaniquement le besoin en fonds de roulement)
- Réduction du « lead time » (cela augmente mécaniquement vos chances de livrer votre produit juste à temps)
- Réduction des transports
- Gain surface (c’est pourquoi la surface est un bon indicateur évaluer le niveau du lean d’une implantation d’usine)
- Communication améliorée
- Favorise le travail en équipe et le management
- Favorise la flexibilité de l’outil de production et des équipements

Principal inconvénient:
Avant de mettre en œuvre la PFC, il faut réaliser (ou avoir un plan pour) la stabilité du process.

Pourquoi ?
Réponse : tout arrêt d’une des machines entraine celle de tout le process. Une approximation de la disponibilité d’une telle implantation est : D= d1*d2*…*dn, où d1, d2, …, dn sont les disponibilités individuelles des machines 1, 2, …,n respectivement. Exemple si vous avez 10 machines ayant des disponibilités de 90% (ce qui est considéré comme étant un bon niveau dans beaucoup d’usines), la mise en œuvre de la PFC produira une installation avec une disponibilité de 0,9 puissance 10, soit environ 35%. Ici, la mise en œuvre de la PFC aboutirait virtuellement une multiplication par 7 de la nuisance de vos problèmes. Je pense que si les choses doivent changer aussi drastiquement, il est important de s’y préparer ou d’avoir un plan afin de ne pas risquer désespérer vos équipes…La stabilité est en effet la première étape de la mise en œuvre du lean. Attention, je ne dis pas que tant que vous n’êtes pas 100% stable vous ne pouvez pas passer aux étapes suivantes. En réalité les choses se passent en spiral. Vous commencez par la stabilité et a un moment donné, quand vous estimez avoir bien avancé et vous sentez confiant, vous passez aux étapes suivantes pour « contraindre » un peu le processus ce qui vous permet de faire émerger d’autres problèmes de stabilité et vous « force » a y retourner … d’où le symbole de la spirale. La spirale doit être perçue comme une roue (la fameuse roue d’amélioration continue) dont le diamètre diminue progressivement. La diminution du diamètre, ici, implique l’amélioration permanente….

15 octobre 2008

Un marteau à la recherche de clous…

Mon pénultième (avant-dernier) post « Back to basics… le Takt time » était incomplet au moins sur deux points. Je voudrais y apporter quelques corrections.

Premier point : J’aurais dû préciser que j’engageais une série de posts sur les outils du lean. Je voudrais également rajouter que cette série ne sera pas continue. Elle sera entrecoupée par d’autres posts.

Deuxième point : J’e n’ai pas souligné le fait que ces outils devraient rester ce qu’ils sont, c'est-à-dire des moyens pour atteindre un objectif. L’objectif la plupart du temps est de résoudre des problèmes qui émergent lors de la mise en œuvre de votre stratégie. Ces outils ne sont pas à déployer systématiquement les uns après les autres. En somme, il faut éviter la situation où on a un marteau en main et on se promène littéralement à la recherche de clous. Comme disent les américains : « hammer looking for nails »….

14 octobre 2008

“Toutes les méthodes marchent…”

J’ai quelque fois utilisé cette phrase dans mes précédents posts pour dire que quand on s’occupe d’un sujet quelque soit la méthode utilisée, on observera une amélioration.

Récemment, au travers de mes lectures j’ai découvert une manière très savante de caractériser cela : « The Hawthorne effect ». Cela caractérise la conclusion de recherchent menées entre 1924 et 1932 chez Hawthorne Works (dans la banlieue de Chicago).
Cette étude, qui a eu un impact important sur le management, consistait surtout à observer comment les operateurs réagissaient aux différentes situations (changement dans l’environnement). On a par exemple remarqué qu’un meilleur éclairage des stations de travail, la propreté des lieux, le bon rangement, et la réorganisation des postes de travail produisaient une augmentation de la productivité. Mais seulement sur une courte période de temps. Depuis ce terme est utilisé pour caractériser des approches conduisant à une amélioration de productivité qui ne dure pas. En somme, les gens deviendraient plus productifs à partir du moment où l’on commencerait à les observer ou à s’intéresser à eux….

Maintenant vous savez que dès l’instant ou vous vous intéresserez à un problème dans votre usine il y aura mécaniquement une amélioration. D’où ma formulation : “Toutes les méthodes marchent, très peu résistent au temps”. En effet, le véritable enjeu c’est de faire perdurer l’amélioration obtenue…

J’entends d’ici certains dire « On peut également avoir une lecture positive du Hawthorne Effect : restez en contact avec le terrain, s’intéresser à ce qui s’y passe, permettra de gagner et maintenir la productivité… C’est peut-être aussi là une des explications du succès du Genchi genbutsu ». Ma réponse : En réalité la présence sur le terrain d’un leader doit aller au delà du Hawthorne effect. Il s’agit d’être là pour détecter les problèmes et les résoudre ! C’est cela le lean. Le Hawthorne effect n’est pas la composante principale, il n’est que résiduel ici.

Le Hawthorne effect s’opère très souvent lors des interventions extérieures, notamment des consultants --ceci n’est pas une charge contre les consultants. La prochaine fois quand vous prendrez un consultant utilisez votre perspicacité pour séparer la part amélioration véritable de la productivité de celle due à l’effet de Hawthorne.

11 octobre 2008

Back to basics… le Takt time

Qu’est-ce que le takt time ?
Le Takt est un mot allemand qui signifie « rythme ». Il représente la cadence à laquelle le client demande le produit. Le Takt est ainsi utilisé pour déterminer la cadence de production des pièces pendant la production.
Comment le calcule-t-on ?
Takt time
= Temps total de production / Demande du client

Exemple :

Temps de production = 8 heures (une équipe)
Demande du client = 960 pièces
Alors le Takt time est
Takt time = 8x 3600 / 960 = 30 secondes par unité.
Notez que le Takt time s’exprime toujours en secondes.

Cela signifie que chaque process doit produire une unité toutes les 30 secondes pour satisfaire la demande du client de 960 unités en une équipe (8 heures).

Quels sont les avantages du Takt time ?

- Process facile à manager
- Maintien de la qualité
- Opérateurs comptables
- Sécurité des employés
- Efficacité améliorée


21 septembre 2008

Quelle est l’importance de la formation dans votre société ?

La semaine dernière, j’ai conduit une formation sur la mise en place du travail standard. Je discutais de possibles idées pour réduire le temps d’opération. L’un des exemples que j’ai présenté était de demander à l’operateur d’utiliser ses deux mains simultanément. Un des participants m’a fait remarquer avec beaucoup d’appoint que ce n’était pas une bonne idée pour la qualité car a faisant cela, l’operateur augmenterait les risques d’erreurs. Alors je lui ai répondu en disant que cela était vrai si on demandait à l’operateur de le faire sans aucune formation. J’ai ensuite pris l’exemple de la conduite de voiture. Souvenez-vous de vos premières leçons de conduites. Maintenant, quand vous y pensez, l’utilisation simultanée des deux pédales (celles des l’embrayage et de l’accélérateur) pour démarrer ou patiner n’était pas facile au début… Mais aujourd’hui vous le faites sans problème. Pourriez-vous l’explique a quelqu’un en un jour ? Certainement pas. Dans nos entreprises la formation « à l’épreuve du feu » ou « sur le tas » est devenue la règle. L’operateur ou le salarié reçoit une formation rapide et est envoyé rapidement dur le terrain dans l’espoir d’en tirer le maximum. Pour revenir à l’exemple de la conduite de voiture, pourriez-vous imaginer les conséquences d’une décision qui consisterait à former les gens a la conduite rapidement et leur demander d’aller « terminer » leur formation sur le tas dans les rue ? Personne n’imaginerait cela n’est-ce pas.

« Pay now or pay more later » ou, en Français : « payer maintenant ou payer plus, plus tard. »

La courbe ci-dessus est intéressante car elle montre tout simplement que quand vous demandez à quelqu’un de faire un job sans formation initiale, vous le rentabilisez plus tôt mais au final il n’atteindra jamais son niveau de performance maximum. Le choix est clair ici : payer tout de suite (en dépensant de l’argent pour former et produire) ou payer plus, plus tard (une performance non optimale sur le reste du temps). Un exemple que je prends très souvent est celui de mon expérience avec la natation. J’ai appris à nager « à l’épreuve de l’eau », tout seul sans aucun moniteur et sans aucune méthode. Aujourd’hui, je sais avancer dans l’eau mais je suis un très mauvais nageur… De même quand un salarié se retrouve en train de faire une tâche ou remplir une fonction sans formation, il est possible qu’il finisse par trouver une manière de s’en sortir et de produire des résultats. Ce qui est certain c’est qu’il performera toujours en dessous des ses potentialités maximales.

14 septembre 2008

Le grand fossé...

Toyota se définit souvent comme une “learning organization” ou, en traduction libre, “une organisation apprenante”. Avec recul, je pense que c’est la véritable différence entre Toyota et les autres entreprises. Bien de gens parlent souvent de secret du lean. Si je devais oser en donner un ce serait la capacité d’apprentissage et d’accumulation de savoir de Toyota. Une fois de plus on est bien loin des outils… que nous adorons copier et déployer ici et là. Les outils sont un moyen d’atteindre une finalité. Très souvent nous focalisons sur les outils et nous oublions de relier les outils à la finalité afin d’apprendre. Chaque problème donne l’occasion de développer une solution et d’apprendre au cours de ce processus. La solution est ensuite conservée et généralisée via la standardisation. Le schéma ci-dessous montre très bien l’écart qui sépare Toyota des autres entreprises.

L’apprentissage chez Toyota a un rapport direct avec le terrain (le Gemba) de plus il est effectué par le « chef » car manager = enseigner. Cela veut dire que chez Toyota le niveau de rétention est entre 75% (pour l’étudiant) et 80% (pour l’enseignant)…Chaque employer est étudiant et/ou enseignant. Dans nos entreprises il y a bien de la formation mais en général cela est réalisé par un formateur spécialisé (qui est très souvent un intervenant extérieur). Cette formation se fait en général via une présentation. Résultat, le niveau de rétention n’est qu’autour de 5%. Eh bien, c’est cela que j’appelle le grand fossé…


02 septembre 2008

Le succès des principes lean dans les primaires américaines

Je suis un passionné de la politique américaine. Il se trouve qu’en 2004, j’étais à Boston quand la convention démocrate s’y déroulait. Cela m’a permis de découvrir le Keynote Speaker (inconnu a l’époque) : Barack Obama. Le lendemain, ma femme, devenue complètement fan, s’est précipitée dans une bibliothèque pour acheter son unique bouquin de l’époque « Dreams from my father ». Je pense qu’elle n’était pas la seule car ce livre est rapidement devenu un bestseller…

Plus que par le passé, je suis encore avec encore un plus grand intérêt les présidentielles américaines… Un récent livre écrit par le journaliste Roger Simon analyse les raisons de l’échec de la campagne de Hillary Clinton : « Relentless : how Barack Obama outsmarted Hillary Clinton ». L’analyse met en évidence la principale force de Barack Obama : l’organisation de sa campagne. Surprenant car d’aucuns penseraient d’abord a son charisme.

Voici quelques raisons, synthèse de mon observation et des analyses de Roger Simon :
- La maitrise du process : quasiment 100% des opérationnels de la campagne d’Obama connaissaient la stratégie et la finalité recherchée. Ils savaient par exemple que tout se jouait sur le nombre de délégués. C’est ainsi qu’ils ont littéralement mené une guerre de tranchée sur ce front. Même quand Obama perdait le vote populaire, l’écart en termes de délègues était souvent très faible voire, quelquefois, à son avantage. Du côte de Clinton, très peu de gens avaient une bonne maitrise des règles du jeu ou de la stratégie – la guerre de chefs était la règle. L’on raconte que même le Stratège de la campagne (Mark Penn) pensait que les règles d’attribution des délégués étaient similaires à celles des républicains : « winner takes all ».
- Le Personnel : tous les opérationnels de la campagne Obama avait une expérience de campagne. Clinton avait embauché beaucoup de personnes novices. Comme chez Toyota, on voit l’importance du savoir.
- Les couts : les frais généraux (hôtels, déplacement, …) étaient maintenus au minimum. De plus la campagne d’Obama est rapidement devenue un mouvement. Les personnes qui l’on rejointe ne venaient pas pour des raisons financière et étaient prêtes à faire des « sacrifices »… Cela aussi, on l’observe chez Toyota (surtout dans les équipes projet). En face, l’équipe Clinton était un véritable mammouth qui consommait 1 million de dollars par jour. Pour info Clinton a terminé sa campagne avec une dette d’environ 20 millions de dollars.
- L’organisation opérationnelle : toute l’équipe d’Obama était installée dans un grand open space au même niveau (cela vous rappelle certainement les espaces de travail chez Toyota). Du coté de Clinton, la campagne était installée dans un immeuble de plusieurs étages et les équipes occupaient de « véritables » bureaux avec des portes….
- Le sens du client : la campagne d’Obama a collectionné des millions numéros de téléphone (le plus grands nombre jamais collecté dans une campagne) et tous les électeurs recevaient personnellement des textos quand il y avait un événement qui se déroulaient pas loin de chez eux. Avec cette organisation, Obama a pu collecter des centaines de millions de dollars et exploser tous les recors. Ils ont on réellement créé un sentiment d’appropriation des électeurs / contributeurs. Cela rappelle le marketing (concessionnaires) de Toyota au Japon.

Je pourrais multiplier ce type d’exemples qui se rapprochent des méthodes très courantes dans le monde du lean. Cela prouve, s’il y avait encore lieu, que ces principes sont universels. Je ne sais pas si Obama sera élu le 4 novembre mais ce que l’on peut déjà dire c’est qu’il aura révolutionné la politique américaine. La seule question qui me taraude c’est celle de savoir si son stratège et/ou son manager de campagne ont suivi une formation lean…

21 août 2008

La Loremo : une approche vraiment lean pour réduire la consommation des voitures

Les principales approches et recherches conduites à ce jour sur la réduction de la consommation en carburant des voitures se focalisent sur les moteurs sans modification fondamentale de la conception même des voitures. Qu’il s’agisse du moteur diesel (avec ou sans filtre a particule), du moteur éthanol/flexifuel (avec toutes les interrogations sur son efficacité réelle et son impact sur la famine dans le monde) ou même du moteur hybride, la plupart des constructeurs de voitures concentrent leur solutions sur la motorisation. Même Toyota, le maître, n’échappe pas à cette logique… En même temps, on a remarqué que les voitures n’arrêtaient pas de « grandir », d’une génération à la suivante.

"Simple, clever, fun"
La Loremo ou « Low Resistance Mobile » ne se focalise passe sur la motorisation mais sur la voiture elle même. En effet pourquoi a-t-on besoin de 2 tonnes de ferraille pour transporter un individu de 80 kg ; soit 4% de VA ? Les concepteurs de la Loremo ont complètement revu la conception de la voiture de manière à réduire son poids et sa résistance a l’air (d’où son nom). A partir de là, tout s’enchaîne car on n’a plus besoin d’un moteur surpuissant pour déplacer la voiture. Un deux-cylindres suffit ! En réalité, le type de moteur (éthanol, hybride, diesel,..) devient secondaire.
Tout cela abouti à une voiture qui consomme environ 1,5 litre tous les 100 kilomètres et ne rejette que 50 grammes de dioxyde de carbone au kilomètre (soit 40 grammes de moins que la toute petite smart). Contrairement à ce que l’on pourrait craindre, le résultat est une voiture à l’allure très sportive. Cela est bien conforme au slogan des concepteurs : "Simple, clever, fun”. Ci-dessous, quelques photos issues de l’article suivant : http://editorial.autos.msn.com/article.aspx?cp-documentid=457882

Pourquoi cette approche est-elle intéressante ?
Se focaliser sur le poids des voitures est complètement dans l’esprit du lean : supprimer le Muda d’abord et à la source. Le constructeur de la Loremo s’est focalisé sur le poids du véhicule et a tout fait pour le réduire. Comme l’affirme Gerhard Heilmaier, le PDG de Loremo AG : Le facteur clé est bien le poids de la voiture et non le moteur.
La production série est prévue pour l’année prochaine, prix de base : 15000 euros.
Seuls détails qui pourraient être perçus comme des inconvénients par certaines personnes : il faut pénétrer dans la voiture par l’avant et les occupants sont installés épaule contre épaule, à l’avant comme à l’arrière. Pour moi, cela est OK. Et vous ?


14 août 2008

La curieuse approche française de “la voix du client” quand il s’agit de voitures haut de gamme

En 1983 au cours d’une réunion top-secrète, Toyota décide de se lancer dans le haut de gamme (véhicule de luxe) sur le marché américain alors dominé par les prestigieuses marques allemandes (Mercedes & BMW) et américaines (Cadillac & Lincoln). Jusqu'à ce moment là, Toyota était un des meilleurs fabricants de voitures grand public et il s’agissait là d’un énorme défi pour le constructeur nippon. Le défi était non seulement technologique mais aussi financier. Cela représentait des investissements de plusieurs milliards de dollars. Comment se faire une place sur ce marché très prestigieux où l’image a beaucoup d’importance ? Pour donner aux clients des raisons de changer, Lexus devait offrir plus de valeur ajoutée que les autres à un prix plus bas… Pour vous donner une idée du challenge, c’est comme si McDonald décidait du jour au lendemain de faire du Paul Bosuse... Nul besoin de vous dire combien les observateurs étaient sceptiques.
Apres un vif débat interne, la décision fût prise de créer de toute pièce une nouvelle marque avec sont réseau de distribution. Ce choix rendait le défi financier encore plus important. En effet, cela voulait dire non seulement un nouveau réseau commercial mais aussi de nouvelles usines, un nouveau centre R&D,… C’est ainsi que la première Lexus (LS 400) arriva sur le marché en 1989. En 2000, Lexus devient la marque numéro 1 en termes de vente de véhicules de luxe, place qu’elle n’a plus jamais quittée. Il serait très difficile de résumer 19 années d’histoire de l’une des plus grandes « success stories » de l’histoire de l’automobile (voire de l’histoire industrielle tout court) dans un post de blog. Cette histoire est exemplaire tant en termes de prise de décision stratégique qu’en termes d’exécution. De nombreux livres en parlent et je les conseillerais vivement à tout manager de l’industrie (automobile ou non). Cette histoire montre surtout l’importance que Toyota a toujours portée à la « voix du client ». Quand on en prend connaissance on se demande comment nos deux constructeurs français peuvent penser avoir du succès dans le haut de gamme en utilisant les mêmes équipes pour concevoir, produire, marketer, commercialiser une voiture sensée être haut de gamme qu’une Peugeot 107 ou une Twingo ? S’agissant du commerce et du marketing, tout le monde comprend que l’on ne vend pas un 607 comme on vend une 107. L’histoire de Lexus nous apprend pourquoi on ne devrait pas vendre une 107 au même endroit qu’une 607, pourquoi les deux voitures ne devaient pas être vendues les mêmes personnes et surtout pourquoi les deux voitures ne devaient porter la même marque. Toyota pousse même la prise ne compte de la « voix du client » plus loin que cela. Le chief engineer (directeur de projet) d’une Yaris ne peut pas forcement devenir du jour au lendemain celui d’une Lexus. Dans les nominations du chief engineer, Toyota tient compte du background des personnes. Ainsi, ils ne vont certainement pas designer une personne qui n’a jamais mis ses pieds en Californie ou conduit des voitures de luxe chief engineer d’une Lexus destinée à la côte ouest des USA (à moins que l’on considère que la phase initiale d’immersion soit suffisante). Quelle que soient les qualités techniques de cette personne, son background peut être considéré comme une barrière qui l’empêchera d’accéder à la « voix du client ». D’ailleurs la première chose que fait un chief engineer après sa nomination est d’accéder à la « voix du client ». Cela signifie certainement que notre chief engineer passera beaucoup de temps aux USA à observer le mode de vie des potentiels clients et a s’immerger dans leurs habitudes de conduite. Je n’ai pas l’intention de faire de la stratégie à deux euros mais mon sentiment est que tant que les deux constructeurs français continueront à « mélanger » le haut de gamme et le reste, ils passeront toujours après les allemands. Créer une nouvelle marque n’est pas synonyme de succès mais ne pas le faire limite considérablement les chances de succès. Apres tout, Nissan ou Honda ne sont pas numéros 1 avec leur marque haut de gamme respective Infiniti et Acura…

07 août 2008

Le temps de la ruée vers l’ouest est-il venu pour PSA Peugeot Citroën ?

GM vient de d’annoncer des pertes record de plus de 15.5 milliards de dollars. La récession économique combinée à la hausse sans précédent du prix de l’essence aux USA a conduit les américains à abandonner leurs véhicules préférés : les trucks et les SUV. Cela est allé très vite. Tout les constructeurs présents aux USA ont été frappés, y compris Toyota qui a vu ses ventes baisser de près de 12%. Les ventes de trucks ont plongé de 23% chez GM, d’environ 20% chez Ford, cette année. Alors face à cette situation, que font les constructeurs installés aux USA ? Ils abandonnent tous les SUV et les Trucks pour se reconvertir aux véhicules plus petits et des véhicules moins consommateurs d’essence (y compris les véhicules hybrides). Véhicules plus petits… Cela ne vous fait penser à rien ?
L’Europe n’est-ce pas ? Les américains vont bientôt passer aux petits véhicules du si courants dans le vieux continent. Tous les constructeurs installés aux USA s’y sont lancés. Mais comme vous le savez il leur faudra du temps. Il faut compter 3 à 4 ans, voire plus pour que les véhicules arrivent sur le marché. Il leur faudra aussi du cash et leur récentes pertes astronomiques ont largement entamé leur réserves en cash. Dans ces conditions, Ford a décidé d’importer aux USA six de ses modèles actuellement fabriqués et commercialisés en Europe. Et c’est là que je pense à PSA Peugeot Citroën, qui ces dernières années, a eu des velléités de retour aux USA. Eh bien, malgré la situation économique difficile, les conditions semblent particulièrement favorables pour ce spécialiste européen de petites voitures. PSA maîtrise la conception et la production des petites voitures. Cela le met en position favorable pour trouver, et bien négocier un partenariat aux USA. Cela au cas où il ne souhaiterait pas s’il lancer tout seul, ce qui me semble plus raisonnable comme approche… Ces derniers temps PSA a beaucoup regardé vers l’Est, le moment de la ruée vers l’ouest est peut-être venu. Cela ne va certainement pas être simple car j’imagine que les deux nouvelles usines lancées par PSA ces dernières (plus une joint-venture) ont certainement réduit ses capacités de mobilisation de cash.

Comme vous le diront les businessmen les plus aguerris, en business tout peut être opportunité, même les événements les plus malheureux tels que la guerre et la crise économique …

05 août 2008

Le travail standard: encore des avantages…

Dans un précédent post, je citais quelques avantages du travail standard. Je rappelle que le travail standard ne se limite pas à la rédaction de documents. La rédaction des documents ne serait que du pur gaspillage si on n’implémentait pas les deux phases suivantes. En réalité, si on n’est pas certain d’aller jusqu’au bout autant ne même pas commencer. Il y a deux étapes importantes qui suivent la rédaction des documents : la formation et la vérification (audit) permanente du respect des standards. Quand le travail standard est correctement mis en œuvre on peut s’attendre aux gains suivants :
– Réduction du nombre de pièces défectueuse d’environ 70%
– Réduction des coûts de plus de 30%
– Augmentation de la productivité de 50%
– Réduction des accidents de 80%
Il s’agit bien sûr d’ordre de grandeur. Le résultat final dépendra bien évidemment de votre situation de départ et de la qualité de l’exécution.
J’ai également retrouvé des données qui montrent qu’une bonne partie d’accidents de production sont dus aux comportements à risque (68%) –voir le graphe ci-dessous. Par conséquent, la mise en œuvre et le respect du travail standard contribuera énormément a l’amélioration de la sécurité sur le lieu de travail. Ce n’est pas étonnant que Toyota soit, une fois de plus, parmi les meilleurs au monde parmi les meilleurs au monde dans le domaine de la sécurité au travail.

03 août 2008

Le lean, « la culture du goulot », et la crise économique

Combien de fois avez vous entendu quelqu’un vous dire « pour conduire toute amélioration, il faut vous focaliser sur votre goulot d’abord! » ?

« L’œuvre de Dieu et la part du diable »
L’un des livres que je conseille très souvent à mes étudiants (ECP et SUPELEC) est « Le But » de Goldratt. En général, je l’accompagne toujours du commentaire : « tout n’y est pas parfait mais c’est un bon point de départ ». En effet, ce « best seller » a la puissance et l’inconvénient que peut avoir un slogan. Un slogan permet de communiquer de manière efficace mais il a également l’inconvénient d’être réducteur.

La prémisse de ce que j’appellerais la « culture du goulot » est : « il y a toujours un goulot dans votre usine » et le reste se passe comme suit :
1. trouvez ce goulot
2. supprimer le goulot
3. puis, passer au goulot suivant
4. aller à 2.

Cela est tellement bien respecté que dans certaines compagnies, la mission des personnes en charge de l’amélioration continue se résume a un travail de cherche-le-goulot-et-supprime-le.
En réalité il y a beaucoup de situations où le goulot n’est plus une contrainte. Dans ce cas que faut-il faire ?

Avant de répondre à cette question revenons au bouquin de Goldratt. Un autre point qui y est très bien présenté est « le but » d’une entreprise. Le but d’une entreprise, quelque soit sa stratégie, est de gagner de l’argent. Et comment gagne-t-on de l’argent ?
En faisant des profits :

profits = marge moyenne * nombre d’unités
marge moyenne = prix de vente moyen – coût moyen

Une entreprise gagnera de l‘agent en actionnant l’un ou les deux leviers suivants
1. augmenter le nombre d’unités vendus, ou/et
2. augmenter la marge moyenne

En réalité nous contrôlons toujours le point (2), via la réduction des coûts bien sûr (et non par l’augmentation du prix de vente qui, comme tout le monde le sait, est fixé par le marché). Nous n’avons pas toujours de contrôle sur le point (2), surtout en période de crise économique. En effet, dans cette situation, la demande baisse et votre goulot n’est plus une contrainte. Alors pourquoi s’y focaliser ?

En période de crise économique, que faut-il dont faire ? Tout simplement se focaliser dur la réduction des coûts, surtout ceux qui augmentent rapidement : les frais généraux, l’énergie, les matières premières, les coûts de main d’œuvre,...

La prochaine fois que vous demanderiez a quelqu'un de « focaliser sur son goulot d’abord! », dites-vous que cela n’est peut-être pas le bon conseil… Se focaliser sur son goulot marche quelquefois mais pas toujours.

29 juillet 2008

Une ou deux idées sur l’orientation à donner au lean en période de crise économique

En période de crise économique les carnets de commandes ont tendance à se désemplir.
Les entreprises qui en ont la possibilité financière (par définition, celles qui déploient déjà le lean au mieux) peuvent choisir de garder le plus longtemps possible la précieuse ressource humaine qu’elles ont mis tellement de temps, d’énergie et d’argent à former. C’est une occasion pour les entreprises qui déploient le lean de profiter de la main œuvre dégagée par la baisse d’activité pour accélérer le déploiement du lean en renforçant les formations et en amplifiant les projets d’amélioration continue.
En général les entreprises qui déployaient déjà bien le lean ont pu réduire leurs coûts. Elles ont un double avantage par rapport aux autres quand la crise arrive. Tout d’abord, en raison de leur frugalité, elles sont celles qui sont les mieux préparées pour traverser la crise. Deuxième point, ayant réduit leurs coûts et augmenté leur chiffre d’affaires, en période de vaches grasses, elles ont pu amasser un « trésor » de guerre leur permettant d’avoir une certaine flexibilité afin d’absorber la grosse variabilité (Mura) qu’introduit la baisse imprévue des carnets de commandes. Si vous êtes dans cette situation alors deux pistes s’offrent à vous. Profiter de la réduction de la charge de travail des individus pour accentuer vos formations (lean et autres) de manière à bonifier davantage votre ressource la plus précieuse (les hommes). Une autre piste complémentaire consiste à en profiter pour « accélérer » votre démanche d’amélioration continue, en mettant plus de personnes sur des Kaizen. Ces chantiers qui justement vous apporteront encore d’autres réductions de coûts permettant de supporter votre baisse de productivité, imposée par la conjoncture. Il ne faut pas oublier que les coûts ne viennent pas que des salaires. Il y’a d’autres coûts qui augmentent beaucoup ces derniers temps (tels que l’énergie, les matières premières, les frais généraux,…) qui peuvent être réduits. De sorte qu’au final, même si la part salariale augmente dans le coût du produits, vous puissiez réduire ou garder constant le coût global. Il est évident que les deux types d’actions ne sont pas les plus faciles à décider. Elles seront encore plus difficiles à vendre en bourse que la réduction des effectifs. Nul besoin de m’ériger ici en donneur de leçons de management. Je souhaite simplement présenter deux pistes d’actions en période de crise et leurs bénéfices pour les manager qui veulent prendre le risque de faire différemment et éviter de rompre le contrat moral (tacite ou explicite) et la dynamique globale qui accompagne le déploiement du lean. Je trouve toujours très déroutant de lancer une dynamique, faire petites réunions et grandes messes pour présenter un plan de déploiement du lean et affirmer (de bonne fois sans aucun doute) que si les employés l’appliquent tout se passera bien et puis splash….. La crise arrive ! Celle-là vous ne l’avez pas prévue et vous n’y êtes pour rien. Et vous revoilà en train de réunir vos collaborateurs de nouveau pour leur expliquer que rien de ce que vous leur aviez dit ne tient plus, et pire encore, que certains d’entre eux vont devoir perdre leur emploi. Eh bien, que vaut désormais votre parole de manager ? Il ne faut pas plus que cela pour rendre les gens cyniques et tuer, pour toujours, toute possibilité de déploiement réel (enthousiaste) du lean… Une fois de plus vous n’y êtes pour rien ! Cela veut, peut-être, simplement dire que vous ne réunissez pas encore toutes les conditions pour déployer le lean à long terme avec de véritables résultats comme Toyota…. A propos, je rappelle que Toyota considère aujourd’hui que le principal pilier de la maison TPS (loin devant le Jidoka et le JIT) est le « respect for people ».

28 juillet 2008

Qui connaît Monsieur Krafcik?

Commençons par un quiz.
Nous nous ressemblons comme deux gouttes d’eau. Nous ne sommes pas vraiment des jumeaux mais plutôt des clowns car nous n’avons ni la même date de naissance, ni le même lieu de naissance. L’un de nous est né il y a 63 (plus très jeune) au Japon et l’autre n’est né il n’y a que 21 ans aux USA. Celui d’entre nous qui est américain a reçu son nom d’un certain John Krafcik. Dernier indice, nous partageons tous les deux des aïeuls américains communs comme W. Edwards Deming et Henry Ford… Et bien d’autres.
Qui sommes-nous?

Le TPS (Toyota Production System) et le lean, bien sûr! Alors me diriez-vous, que viennent voir John Krafcifk et W. Edwards Deming dans cette histoire. Que font-ils là ?

Le mot lean a été « inventé » il y a 21 ans au MIT. John Krafcifk était l’un des nombreux chercheurs de l’IMVP (International Motor Vehicle Program) dirigé alors par Jim Womack. Alors que le groupe se préparait à faire paraitre ses premières publications sur les méthodes de travail de Toyota, ils se sont dit qu’il serait « sympa » de trouver un nom qui caractériserait le mieux possible le Toyota Production System. Le groupe s’est donc lancé dans un brainstorming. John Krafcifk est celui qui a proposé le mot « lean » qui, comme vous le savez tous, signifie « maigre », « sans gras ». Quant a W. Edwards Deming, il fait parti de la longue liste des occidentaux dont le TPS a utilisé les travaux. Liste dans laquelle se trouve également Henry Ford et d’autres, moins connus, tels que Charles Allen. Le TPS a largement puisé dans de le réservoir du savoir occidental. Ce n’est que juste retour si l’occident copie à son tour le TPS (j’y ai d’ailleurs consacré un de mes précédents posts). S’agissant de la date de naissance du TPS, Il y n’a pas eu, en tant que tel, une déclaration officielle de naissance ou alors, contrairement au Lean, un moment « magique » de baptême. Toutefois on positionne en général cette naissance en 1945, juste après la fin de la seconde guerre mondiale. Son père officiel est Taiichi Ohno.

Voila c’était juste un clin d’œil… Et rappelez-vous, l’inventeur du mot lean n’est pas Jim Womack ou un autre mais John Krafcifk. La valeur ajoutée de cette info n’est pas évidente car sa connaissance ne vous aidera pas à mieux déployer le lean dans votre entreprise… Et je parie que demain déjà vous ne vous en souviendrez déjà plus.

24 juillet 2008

Votre méthode de calcul du rendement est-elle lean-friendly ? Deuxième partie.

Sans vouloir faire de l’anglophilie gratuite, je dirais que je préfère l’appellation anglo-saxonne du RS : OEE. Qui veut dire Overall Equipment Effectiveness. Notez que c’est bien effectiveness et non efficiency comme le définissent certains abusivement. Pourquoi ? Eh bien, parce que les deux mots ne veulent pas dire la même chose… Je ne cherche pas à jouer avec les mots ici… Si vous n’en êtes pas convaincus jetez un coup d’œil dans votre dictionnaire (même français) et vous verrez la différence qu’il y a entre les mots « efficacité » et « effectivité ». Mon exemple favori est celui de la communication. Vous souhaitez faire passer des messages à votre collègue de travail qui est dans un bureau à 2 mètres de vous. Si vous lui envoyiez plein d’emails de votre ordinateur, votre démarche serait très efficace car en très peu de temps vous pourriez lui faire parvenir plusieurs messages. Mais est-ce que la communication est bien passée ? En d’autres termes, les a-t-il bien reçus et a-t-il bien compris ce que vous vouliez ? Rien n’est moins sûr. La manière la plus effective (mais un peu moins efficace) aurait été de vous lever aller voir votre collègue, discuter directement avec lui et vous assurer que le message est bien passé. Notez que l’un n’exclut pas l’autre. On peut être à la fois efficace et effectif ; c’est d’ailleurs l’idéal… Apres cette explication étymologique, qui était nécessaire, revenons au OEE. Comme vous le savez le OEE ou le RS peut être défini comme la proportion de pièces bonnes produites par rapport à votre capacité de production maximale. Afin de mieux le suivre on le défini également comme le produit de 3 sous-indicateurs : la disponibilité opérationnelle, le taux d’allure et le taux de qualité. Comme son nom l’indique le taux de qualité, qui est la proportion de pièces bonnes produite par rapport à la production réalisée, vous permettra de mesurer la capacité de votre machine à produire des pièces de qualité. La disponibilité opérationnelle vous permettra d’évaluer les temps d’arrêts visibles subis par votre machine. J’y reviendrai… Quant au taux d’allure, il est le rapport entre le temps de cycle théorique ou standard de votre machine et le temps de cycle réel. En réalité, il vous permet d’estimer l’impact de tous les petits arrêts et ralentissements que vous n’avez pas pu mesurer ou voir. C’est grosso modo tout ce qui n’a pas pu être inclus dans la disponibilité opérationnelle faute de visibilité. En General, le calcul du taux d’allure et du taux de qualité ne cause pas de problème. L’objet du litige est souvent la disponibilité opérationnelle. C’est qu’il est défini come étant le rapport du temps de fonctionnement (ou temps de production) sur temps requis (ou temps d’ouverture). Le temps de production est en général très facile à calculer : on peut soit le mesurer ou tout simplement compter le nombre pièces produites et multiplier par le temps de cycle. La mine a discussions est le temps requis… qui est finalement le temps par rapport auquel (ou pendant lequel) vous souhaitez mesurer la performance de votre machine. Qu’elle est la meilleure façon définir ce temps ? En réalité il n’y a pas de bonne ou de mauvaise façon et dans la pratique cette définition varie d’une usine à l’autre. Toutefois, les deux points qui me semblent importants quand on définit un indicateur sont : la visibilité et le respect des principes du lean. Je rappelle que la visibilité elle mène est un des principes importants du lean. N’oublions pas, en effet, que l’essence même du lean au quotidien consiste à rendre les problèmes visibles afin de les résoudre. Si je m’appuie sur les deux règles citées ci-dessus (visibilité et respect du lean), je dirais qu’il faut tout inclure dans la disponibilité opérationnelle sauf les arrêts qui sont la conséquence du respect des principes du lean.

- La visibilité : ici, je pourrais paraphraser W. Edwards Deming en disant « ce qui ne se voit pas ne s’améliore pas ». Dans l’exemple du OEE (rendement synthétique) vous devez vous assurer que son calcul n’exclut pas certain arrêts. Les arrêts les plus couramment exclus à tors sont les pauses, les arrêts pour repas. L’argument avancé pour les exclure est toujours le même : « nous n’avons pas de possibilité d’agir la dessus, c’est la convention / la loi ». Ma réponse est toujours la même : « ce n’est pas parce que vous ne pouvez pas supprimer les pauses que vous ne pouvez pas réduire leur impact sur la production ». Une solution toute simple consiste (quand cela est possible) d’organiser des pauses roulantes, avec ponctuellement un ou plusieurs operateurs de plus. Il s’agit d’organiser les choses de sorte que tous les operateurs ne prennent pas leur pause en même temps. Si vous excluez ce temps du calcul de votre OEE alors cela n’est plus visible et on en parle plus. Laissez dans le calcul du OEE et le seul risque que vous encourez c’est que cela amène le fabricants à imaginer des solutions ingénieuses pour limiter son effet…
- Le deuxième point important est de vous assurer que votre calcul ne va pas à l’encontre des principes du lean, En un mot qu’il est lean-frienly. Pour ce faire il faudrait exclure, comme, je l’ai dit précédemment tous les arrêts dus au respect des principes du lean afin ne pas « pénaliser » tous ceux qui les respectent… Cela n’aurait pas de sens de voir un indicateur évoluer négativement quand on respecte les principes du lean. Très concrètement, il faudrait exclure tous les arrêts dus a la l’absence de demande du client. En voici quelques exemples : le kanban plein (absence de carte kanban), absence de commande, arrêts d’une machine surcapacitaire.

Visibilité et respect des principes lean (ne pas aller dans le sens contraire), voila deux règles minimales à respecter non seulement en ce qui concerne la méthode de calcul de vos RS mais aussi de tout autre indicateur.

23 juillet 2008

Votre méthode de calcul du Rendement Synthétique (RS) est-elle lean-friendly ? Première partie.

Il n’est pas rare de constater qu’une entreprise qui déclare déployer le lean possède encore des indicateurs de performance et d’évaluation de ses managers qui favorisent la production de masse et découragent les reflexes lean. L’exemple que je voudrais traiter dans ce post et les suivants est celui du Rendement Synthétique.
Le Rendement Synthétique est sensé vous permettre de mesurer « l’étant de sante » de chacune de vos machines. Il se définit très globalement comme le rapport entre le nombre de pièces bonnes produites et la capacité maximale de production. Voila un indicateur dont le mode de calcul est très flou, malgré l’existence d’une norme CNOMO sur le sujet. Le nom même nous ramène à la production de masse.
En effet quand on entend ou voit « rendement » les termes qui sont souvent positionnés avant sont « augmentation », « amélioration » … Bref tous les termes qui poussent à l’augmentation de la quantité. Or augmenter le RS d’une machine n’est pas la garantie de l’augmentation de la production au bout de l’usine (a moins que celle-ci soit le goulot). De plus, si la demande du client n’augmente pas, augmenter la production revient à faire de la surproduction, qui est comme vous le savez l’un des 7 Muda. Le livre de Goldratt (Le but) a popularisé la méthode dite de « goulot » a permis d’utiliser utilement le RS pour identifier la machine goulot et l’améliorer. Cela permet de lier une action local a la production en sotie d’usine. C’est pour cela que le RS est très associée à la méthode dite du goulot dans certaine entreprise. La question qui me vient à esprit est la suivante : que fait-on quand vous n’avez pas de goulot ? Et ne me dites pas qu’il y en a toujours ! Je reviendrais sur cette question dans un prochain post.

Suite au post suivant…

20 juillet 2008

Le lean, est-ce la solution à la récession?

Par ces temps où les affaires ne vont pas bien d’aucuns pourraient trouver dans le lean une solution a leur problèmes. En effet, ne dit-on pas que dans le lean il est question de réduction de coûts ? Alors quoi de plus à-propos que d’utiliser le lean pour réduire les coûts quand on en a besoin ? Cela fait forcement sens, n’est-ce pas?

« Le bon processus conduit aux bons résultats »
Cette citation est bien connue dans les cercles du lean, notamment de tous les dirigeants qui mettent en œuvre sérieusement le lean. Alors comment se fait-il qu’à la première secousse économique on s’attaque tout de suite au processus (en même tant qu’aux effectifs) en supprimant certaines activités au motif que cela occasionne des coûts (frais de déplacement, par exemple) ? Je veux être clair. Je ne dis pas qu’il ne faut pas faire du Kaizen. Tout ce que je dis c’est que toute entreprise doit avoir un processus qui définit sa méthode la plus lean possible de faire son business. Exemple pour mettre un produit sur le marché, il faut concevoir le produit et son processus de fabrication, le fabriquer, et le mettre sur le marché. Pour concevoir un produit il y a un certains nombre d’étapes à travers lesquelles il faut passer et ces étapes peuvent consister en un certain nombre d’opérations qui demandent la présence physique des participants. Si on supprime une ou plusieurs de ces opérations, alors de deux choses l’une :
- soit l’on n’avait pas réellement besoin de ces opérations et donc dans ce cas on n’avait pas un processus lean. Dans ce cas la récession peut être perçue comme une opportunité. On peut dont logiquement s’interroger sur le sérieux des initiatives lean lancées depuis quelques années : comment se fait-il que l’on n’ait pas vu toutes ces opportunités des gains si importants ?
- soit on avait besoin de ces opérations. Dans ce cas il est très dangereux de les supprimer car l’on s’attaque au processus avec le risque que les résultats soient dégradés. A moins que l’on ait redéfinit les objectifs quantitativement ou qualitativement (exemple abandon de certains produits ou réduction de la quantité à produire), ce geste accélèrera la dynamique du cercle vicieux…

« Les hommes constituent notre ressource la plus précieuse »
La aussi, je pourrais faire un laïus semblable au précédent sur la réduction des effectifs. La réduction de ressources humaines se justifie largement si après avoir fait le kaizen de votre processus vous n’avez plus besoin d’autant de ressources humaines pour faire ce que vous faisiez avant. Cela peut être la conséquence de la réduction des quantités produites. Au final, tout est une question d’heures de travail, appelez ça Homme-années, Homme-heures, ligne budgétaire ou autre… Toute réduction de coûts qui n’est pas le résultat de ce processus est très risquée. Bien sûr comme d’habitude il doit y avoir une dimension « challenge » : demander à ses équipes de faire un peu plus qu’elles savent faire. Comme je l’ai souvent écrit par dans mes précédents posts, il faut aussi le support et le coaching du management en parallèle afin d’éviter le MURI qui, à mon avis, est le pire de 3 MU et en même temps le moins regardé.

Contrairement aux pratiques courantes, c’est bien pendant les périodes fastes qu’il faut faire un maximum de Kaizen de manière à être complètement prêt quand les mauvais temps seront là. C’est un fait, les entreprises les plus lean traversent plus facilement les périodes de turbulences que les autres. C’est aussi à cela que l’on les reconnaît.

03 juillet 2008

Quelle est la capacité optimale du stock chez Toyota?

Suite à mon dernier podcast relatif au niveau des stocks chez Toyota, j’ai reçu un certain nombre de questions des lecteurs du blog. Je vais m’attarder plus précisément sur l’une d’entre elles : Quel est le niveau de stock optimal chez Toyota ?
Comme je l’expliquais très succinctement dans le podcast, initialement, la consigne chez Toyota était le « zéro stock » il y a quelques années. Consigne imposée par l’inventeur du TPS Taïchi Ohno. Je souligne que beaucoup de consultants du lean en sont restés à ce « dogme ». Si quelqu’un vous affirme que le « zéro stock » est la règle, méfiez-vous en.
Pour revenir à notre sujet, après la retraite du grand maître du TPS, Taïchi Ohno, les ingénieurs de chez Toyota se sont rendu compte qu’un peu de stock permettait d’absorber de petites variabilités naturelles du système avec un effet très positif sur la production. Je rappelle que l’un des 3 Mu que combat Toyota est le Mura. Nous l’oublions quelque fois. Sans faire de jeu de mots un peu de Muda (stock) permet de réduire le Mura. La règle est également vraie pour le Muri. Un peu de Muda (éviter de charger les hommes et les machines a 100%) permet de d’éviter le Muri. Revenons à notre sujet. Je voudrais rappeler qu’une ligne comportant des opérations manuelles aura toujours un temps de cycle variable. Dans ces conditions il est intéressant de découpler cette ligne des lignes amont et/ou aval par des petits stocks (il ne s’agit pas de positionner des stocks entre les postes de la ligne mais bel et bien de découpler la ligne toute entière). Ces petits stocks ont également une fonction opérationnelle et « managériale » chez Toyota. En effet, ils servent de « frontières » entre les différentes équipes. Ces petites équipes ont a leur tète des team leaders qui jouissent d’une relative autonomie conférée par ces petits stocks amont et aval.
Eh bien, quelle doit être la capacité de ce petit stock alors ? Toyota n’utilise pas d’équation très compliquée pour cela. Je dois avouer que l’approche de Toyota sur ce point précis peut être décevante pour les aficionados des méthodes analytiques. L’approche est plutôt empirique et dupliquée dans les nouvelles usines. Très généralement, sur une ligne a 60 pièces / heure, ils mettront des stocks de 5 places. Pourquoi 5 places ? Je n’ai pas plus d’explication que vous. Je ne suis même pas certain que cela soit important. Un stock de 5 places leur permet d’absorber ce qu’ils considèrent comme des micro arrêts (jusqu'à 5 minutes, suivant l’état du stock). Toutes les autres pannes amont ou aval qui arrêtent la ligne (et surtout celles de plus de 10 minutes feront l’objet d’un traitement spécial et approfondi, explications, recherche de cause racines,…) Au lieu de rechercher le chiffre magique ici, je pense que ce qu’il faudrait plutôt retenir c’est la démarche / organisation. Un petit stock pour absorber les petits problèmes de manière à ne pas pénaliser la production. Ce stock permet aussi, au passage, de définir les limites des équipes… La capacité de stockage doit, toutefois, rester suffisamment faible pour permettre de faire surfacer les problèmes… Je rappelle, une fois de plus, qu’un des principes fondamentaux chez Toyota consiste à rendre les problèmes visibles et les traiter.
Une fois de plus, ce sujet montre que Toyota donne la primauté au management/processus, par rapport à la technique. La quantité précise des stocks est moins importante que l’utilisation que l’on en fait. Mon conseil, si vous avez beaucoup de stocks dans votre usine, appliquez la méthode spirale (cela a la forme d’un escargot). Réduisez-le progressivement et, à chaque fois diminuez un peu plus que nécessaire de manière a maintenir une certaine « contrainte » pour challenger vos équipes. Mais les abandonnez pas a leur soucis car il faut toujours associer le « challenge » au soutien. Un dernier mot : si vous déployez sérieusement le lean, cela coutera toujours moins cher de les diminuer (voire supprimer certains) que de les garder.
Voila…