21 septembre 2008

Quelle est l’importance de la formation dans votre société ?

La semaine dernière, j’ai conduit une formation sur la mise en place du travail standard. Je discutais de possibles idées pour réduire le temps d’opération. L’un des exemples que j’ai présenté était de demander à l’operateur d’utiliser ses deux mains simultanément. Un des participants m’a fait remarquer avec beaucoup d’appoint que ce n’était pas une bonne idée pour la qualité car a faisant cela, l’operateur augmenterait les risques d’erreurs. Alors je lui ai répondu en disant que cela était vrai si on demandait à l’operateur de le faire sans aucune formation. J’ai ensuite pris l’exemple de la conduite de voiture. Souvenez-vous de vos premières leçons de conduites. Maintenant, quand vous y pensez, l’utilisation simultanée des deux pédales (celles des l’embrayage et de l’accélérateur) pour démarrer ou patiner n’était pas facile au début… Mais aujourd’hui vous le faites sans problème. Pourriez-vous l’explique a quelqu’un en un jour ? Certainement pas. Dans nos entreprises la formation « à l’épreuve du feu » ou « sur le tas » est devenue la règle. L’operateur ou le salarié reçoit une formation rapide et est envoyé rapidement dur le terrain dans l’espoir d’en tirer le maximum. Pour revenir à l’exemple de la conduite de voiture, pourriez-vous imaginer les conséquences d’une décision qui consisterait à former les gens a la conduite rapidement et leur demander d’aller « terminer » leur formation sur le tas dans les rue ? Personne n’imaginerait cela n’est-ce pas.

« Pay now or pay more later » ou, en Français : « payer maintenant ou payer plus, plus tard. »

La courbe ci-dessus est intéressante car elle montre tout simplement que quand vous demandez à quelqu’un de faire un job sans formation initiale, vous le rentabilisez plus tôt mais au final il n’atteindra jamais son niveau de performance maximum. Le choix est clair ici : payer tout de suite (en dépensant de l’argent pour former et produire) ou payer plus, plus tard (une performance non optimale sur le reste du temps). Un exemple que je prends très souvent est celui de mon expérience avec la natation. J’ai appris à nager « à l’épreuve de l’eau », tout seul sans aucun moniteur et sans aucune méthode. Aujourd’hui, je sais avancer dans l’eau mais je suis un très mauvais nageur… De même quand un salarié se retrouve en train de faire une tâche ou remplir une fonction sans formation, il est possible qu’il finisse par trouver une manière de s’en sortir et de produire des résultats. Ce qui est certain c’est qu’il performera toujours en dessous des ses potentialités maximales.

14 septembre 2008

Le grand fossé...

Toyota se définit souvent comme une “learning organization” ou, en traduction libre, “une organisation apprenante”. Avec recul, je pense que c’est la véritable différence entre Toyota et les autres entreprises. Bien de gens parlent souvent de secret du lean. Si je devais oser en donner un ce serait la capacité d’apprentissage et d’accumulation de savoir de Toyota. Une fois de plus on est bien loin des outils… que nous adorons copier et déployer ici et là. Les outils sont un moyen d’atteindre une finalité. Très souvent nous focalisons sur les outils et nous oublions de relier les outils à la finalité afin d’apprendre. Chaque problème donne l’occasion de développer une solution et d’apprendre au cours de ce processus. La solution est ensuite conservée et généralisée via la standardisation. Le schéma ci-dessous montre très bien l’écart qui sépare Toyota des autres entreprises.

L’apprentissage chez Toyota a un rapport direct avec le terrain (le Gemba) de plus il est effectué par le « chef » car manager = enseigner. Cela veut dire que chez Toyota le niveau de rétention est entre 75% (pour l’étudiant) et 80% (pour l’enseignant)…Chaque employer est étudiant et/ou enseignant. Dans nos entreprises il y a bien de la formation mais en général cela est réalisé par un formateur spécialisé (qui est très souvent un intervenant extérieur). Cette formation se fait en général via une présentation. Résultat, le niveau de rétention n’est qu’autour de 5%. Eh bien, c’est cela que j’appelle le grand fossé…


02 septembre 2008

Le succès des principes lean dans les primaires américaines

Je suis un passionné de la politique américaine. Il se trouve qu’en 2004, j’étais à Boston quand la convention démocrate s’y déroulait. Cela m’a permis de découvrir le Keynote Speaker (inconnu a l’époque) : Barack Obama. Le lendemain, ma femme, devenue complètement fan, s’est précipitée dans une bibliothèque pour acheter son unique bouquin de l’époque « Dreams from my father ». Je pense qu’elle n’était pas la seule car ce livre est rapidement devenu un bestseller…

Plus que par le passé, je suis encore avec encore un plus grand intérêt les présidentielles américaines… Un récent livre écrit par le journaliste Roger Simon analyse les raisons de l’échec de la campagne de Hillary Clinton : « Relentless : how Barack Obama outsmarted Hillary Clinton ». L’analyse met en évidence la principale force de Barack Obama : l’organisation de sa campagne. Surprenant car d’aucuns penseraient d’abord a son charisme.

Voici quelques raisons, synthèse de mon observation et des analyses de Roger Simon :
- La maitrise du process : quasiment 100% des opérationnels de la campagne d’Obama connaissaient la stratégie et la finalité recherchée. Ils savaient par exemple que tout se jouait sur le nombre de délégués. C’est ainsi qu’ils ont littéralement mené une guerre de tranchée sur ce front. Même quand Obama perdait le vote populaire, l’écart en termes de délègues était souvent très faible voire, quelquefois, à son avantage. Du côte de Clinton, très peu de gens avaient une bonne maitrise des règles du jeu ou de la stratégie – la guerre de chefs était la règle. L’on raconte que même le Stratège de la campagne (Mark Penn) pensait que les règles d’attribution des délégués étaient similaires à celles des républicains : « winner takes all ».
- Le Personnel : tous les opérationnels de la campagne Obama avait une expérience de campagne. Clinton avait embauché beaucoup de personnes novices. Comme chez Toyota, on voit l’importance du savoir.
- Les couts : les frais généraux (hôtels, déplacement, …) étaient maintenus au minimum. De plus la campagne d’Obama est rapidement devenue un mouvement. Les personnes qui l’on rejointe ne venaient pas pour des raisons financière et étaient prêtes à faire des « sacrifices »… Cela aussi, on l’observe chez Toyota (surtout dans les équipes projet). En face, l’équipe Clinton était un véritable mammouth qui consommait 1 million de dollars par jour. Pour info Clinton a terminé sa campagne avec une dette d’environ 20 millions de dollars.
- L’organisation opérationnelle : toute l’équipe d’Obama était installée dans un grand open space au même niveau (cela vous rappelle certainement les espaces de travail chez Toyota). Du coté de Clinton, la campagne était installée dans un immeuble de plusieurs étages et les équipes occupaient de « véritables » bureaux avec des portes….
- Le sens du client : la campagne d’Obama a collectionné des millions numéros de téléphone (le plus grands nombre jamais collecté dans une campagne) et tous les électeurs recevaient personnellement des textos quand il y avait un événement qui se déroulaient pas loin de chez eux. Avec cette organisation, Obama a pu collecter des centaines de millions de dollars et exploser tous les recors. Ils ont on réellement créé un sentiment d’appropriation des électeurs / contributeurs. Cela rappelle le marketing (concessionnaires) de Toyota au Japon.

Je pourrais multiplier ce type d’exemples qui se rapprochent des méthodes très courantes dans le monde du lean. Cela prouve, s’il y avait encore lieu, que ces principes sont universels. Je ne sais pas si Obama sera élu le 4 novembre mais ce que l’on peut déjà dire c’est qu’il aura révolutionné la politique américaine. La seule question qui me taraude c’est celle de savoir si son stratège et/ou son manager de campagne ont suivi une formation lean…